.

Roland-Garros 78, avec Henri Cochet

Wimbledon 78. Et de trois !
(65) 1978 :
Borg, un petit chelem raté... 
d'un pouce !
.
Episode précédent :
1977 suite et fin


Episode suivant :
1979 : Connors à Roland-Garros



La grande et bonne nouvelle de ce début de saison, c'est la mauvaise santé financière de la World Team Tennis. Malgré une assistance record en 1977, l'organisation des Intervilles est toujours lourdement déficitaire, et les contrats de Borg et Connors ne sont pas renouvelés. Pour les dirigeants de Roland-Garros, c'est l'espoir de voir enfin le bout du tunnel. La menace que les promoteurs d'Interville faisaient peser sur leur tournoi disparaît enfin. Pour l'édition 1978, le retour de Borg est assuré, et la participation de Connors espérée. Hélas, l'affrontement Borg-Connors, tant attendu par le public de la Porte d'Auteuil n'aura pas lieu. L'américain, rancunier, n'oublie pas qu'on lui a interdit l'entrée du stade pendant 4 ans. Après un formidable début de saison qui le voit remporter 5 tournois, il doit soudain s'arrêter pour soigner un mal mystérieux. On parle de mononucléose, et Connors en profite pour se reposer avant de commencer sa préparation pour Wimbledon. Jusqu'au dernier moment, les dirigeants de Roland-Garros, attendront son inscription. Mais l'américain ne donne pas de nouvelles, et Roland-Garros, se prépare finalement à une cinquième édition consécutive sans le N°1 au classement ATP
Avec le retour de Borg, Roland-Garros retrouve tout de même le sourire, et on est curieux de voir comment Vilas va défendre son titre contre celui qui est habituellement sa bête noire sur le circuit. L'argentin va vite être renseigné, et il a du souci à se faire. Jouant mieux que jamais, avec ses puissants coups du fond de courts qui usent tous ses adversaires, le suédois, impérial, fait au cours de la quinzaine une démonstration de tennis. Il ne perd pas un set, et ses scores réalisés contre des spécialistes de la terre battue sont éloquents : 6-0 6-2 6-2 contre Bertolucci, 6-2 6-4 7-6 contre Tanner, 6-3 6-3 6-0 contre Ramirez (N°6), et 6-0 6-1 6-0 contre Barrazutti (N°7) en demi-finale ! Les scores réalisés laissent rêveurs, surtout contre Ramirez et Barazutti, deux spécialistes de la terre battue, classés dans les 10 premiers mondiaux et habituellement terriblement accrocheurs. Pire, ils avoueront tous les deux à la conférence de presse d'après match, avoir pourtant eu l'impression de bien jouer ! 

Dans sa moitié de tableau, Vilas avance lui aussi jusqu'en finale, mais il est moins convainquant que l'année passée. Cinq longs sets contre Billy Martin au deuxième tour (il sauva même une balle de 5/1 au cinquième...), quatre contre le junior français Yannick Noah, cinq encore en quart de finale contre le chilien Gildemeister. Sa victoire facile en trois sets contre l'américain Stockton est plus rassurante, mais l'américain n'est pas un spécialiste de la terre battue... Voilà Vilas en finale, l'explication avec Borg aura bien lieu !


Barazutti, un terrible acrocheur sur
terre battue. Il emmena l'Italie à la
victoire en coupe Davis en 1976. Il ne
fit qu'un jeu contre Borg en demi-finale !
Le jour de la finale, par un beau dimanche de juin, Roland-Garros commence par fêter son cinquantenaire. Une émouvante cérémonie qui rappelle qu'en 1928, dans un stade flambant neuf construit pour défendre la coupe Davis, Henri Cochet remportait le premier Roland-Garros de l'histoire. Cinquante ans plus tard, le mousquetaire est encore là avec ses camarades Borotra et Lacoste. Tous les anciens vainqueurs encore en vie ont été invités, et le court central se remplit pour l'occasion d'une belle brochette de champions : Perry, Budge, Drobny, Hoad, et quelques autres.... Mais l'ombre des Intervilles plane encore sur le vieux stade, et il y a quelques grands absents de marque comme Laver, Rosewall, Emerson, ou Nastase, tous retenus aux États-Unis par de lucratifs contrats...

Vilas, le dernier des anciens vainqueurs appelés sur le Central le jour de l'ouverture du tournoi.
Il est le seul à se présenter en short pour la cérémonie, déjà prêt à défendre son titre 
face à sa bête noire, Bjorn Borg.
.

Vilas et Borg dos à dos pour une
finale à sens unique...
Pour Borg, la finale est à l'image des tours précédents : en sens unique. La machine à broyer est en marche, elle ne s'enrayera pas... Le pauvre Vilas ne trouve aucune solution face aux coups profonds et précis de son adversaire. Comme les autres, Vilas résiste, s'épuise, et finit par exploser... Il eut beau chercher le soutien moral de son entraîneur Tiriac, rien n'y fit. La partie tourne à la démonstration, et les changements de tactique n'y feront rien. Borg est resté concentré du début à la fin, et a contré sans problèmes toutes les initiatives de l'argentin. Au fond du court comme au filet, le suédois est le maître du court : score final 6-1 6-1 6-3.  Plus de doute, le nouveau roi de la terre battue, c'est lui !
.

Vilas a l'attaque. Il aura tout essayé 
pendant cette finale. Mais le score est
bien cruel : 6-1 6-1 6-3

Tennis de France Juin 1978
"Borg la foudre"
Deux semaines plus tard, à Wimbledon, c'est une finale Borg-Connors que tout le monde attend, et on ne voit pas très bien qui pourrait venir jouer les trouble-fête. On est curieux de revoir John McEnroe, la surprise de l'année précédente, qui après une année passée à l'université de New-York vient enfin de passer professionnel. Mais le jeune américain, tête de série N° 12, est un peu à court de compétition, et cette fois, il est attendu. Il chute lourdement au premier tour contre l'américain Van Dillen, après une longue bataille en 5 sets. 
..

C'est parti pour l'échauffement. On va enfin savoir
qui est le N° 1 mondial. Le suspense ne va 
pas durer longtemps...
  Borg, lui aussi, a du mal au premier tour. Par un temps couvert et froid, il affronte le géant américain Victor Amaya, au terrible service. Le jeu est décousu, sans échange, avec une balle qui fuse sur le gazon humide, et Borg à bien du mal à retrouver ses marques. Il est même mené deux sets à un, puis 3-1 dans le quatrième et une balle de deuxième break contre lui... Ça sent le roussi, mais, comme le dira Borg plus tard, "- C'était le moment de prendre des risques et c'est ce que j'ai fait !". Un ace, deux bons services et le break fatal est évité. La confiance revient enfin, et le suédois fait 5 jeux de suite. Il remporte les deux derniers sets 6-3 6-3. La suite est heureusement plus facile jusqu'en finale où il va rencontrer l'inévitable Connors. L'américain est en forme, comme le montre sa victoire expéditive contre Gerulatis en demi-finale (9-7 6-2 6-1).  Ce sont bien les deux plus forts qui vont s'affronter sur le central, Borg pour un triplé, et Connors pour éviter une troisième défaite en finale en quatre ans ! Le spectacle promet d'être somptueux...
Les premiers coups de raquettes sont à l'avantage de l'américain qui mène 2-0. Puis Borg serre le jeu et prend possession du filet. Ses attaques sont profondes, ses volées tranchantes et il ne rate rien. Il remporte le premier set 6-2, mais rien ne permet encore de penser qu'il se dirige vers une victoire facile. Connors semble être dans un bon jour, il rentre à fond dans la balle comme à son habitude, et ses coups sont si puissants qu'il semble qu'un rien puisse faire basculer le match dans l'autre sens. Dès le début du second set, il perd encore son service, mais se bat sur toutes les balles. Mené 1-2, Jimbo réussit enfin trois retours formidables et mène 0-40 sur le service de Borg. Trois balles de de-break qui peuvent relancer le match. Avec trois services dévastateurs que l'américain ne put toucher, le suédois reprit définitivement le contrôle du match. La suite appartient à la légende : Connors qui se bat, mais qui regarde défiler les jeux avec inquiétude, en attendant une baisse de régime de son adversaire qui ne vint pas. Borg ce jour là ne connut aucune faiblesse, fit un minimum d'erreurs et ne perdit aucun point important : score final 6-2 6-2 6-3 !

Connors à la peine. Il aura tout
essayé, mais en vain...

C'est fini... Connors n'a pas l'air content, et
Borg ne semble pas très fatigué !
 

L'accolade de Fred Perry
dernier vainqueur anglais,
et auteur d'un mémorable 
triplé en 1934-35-36
..
Pour Borg, cette troisième victoire consécutive lui vaut les félicitations de Fred Perry, qui réalisa le même exploit dans les années 30. De plus, ce premier doublé Roland-Garros/Wimbdledon réussi le met sur la route d'un possible grand chelem, qui s'achèverait en cas de victoire à l'US Open, à la fin de l'année en Australie.  Quant à Connors, on raconte qu'il aurait laché en sortant du court "Je le poursuivrai sur tous les courts du monde, jusqu'à ce que je le batte !"...

Borg à l'US Open 1978 
La route du grand chelem passe donc par l'US Open qui pour la première fois se tient dans le nouveau stade de Flushing Meadow. Dans ce nouveau décor, Borg et Connors sont encore les favoris pour une finale qui sent la revanche. Mais si Borg a un parcours assez tranquille, Connors connut une chaude alerte en huitième de finale contre Adriano Panatta. Après une année sans résultats, l'italien a enfin retrouvé son toucher de balle et son envie de gagner. A deux sets partout, c'est lui qui fait le break et mène bientôt 5-3. La réaction de l'américain est à la hauteur de l'enjeu. En grand patron, il prend alors tous les risques et fait quatre jeux extraordinaires, sans que l'italien ait pu avoir une seule balle de jeu ! La voie est libre et Connors domine sans trop de problème en demi-finale un John McEnroe en pleine ascension, mais encore un peu tendre. La revanche de Wimbledon peut avoir lieu...
.
C'est un Connors éblouissant qui va d'entrée prendre la direction des opérations. Sur cette surface à mi-chemin entre les rebonds de la terre battue et la vitesse de l'herbe, son tennis trouve toute son efficacité. Ce jour là, Borg, devant un tel ouragan, rate son rendez-vous avec l'Histoire. Si la qualité du jeu de Connors fit l'unanimité chez tous les observateurs, la rumeur d'une ampoule au pouce droit de Borg circula assez rapidement. Comment expliquer autrement une telle déconfiture: pas une seule balle de break sur le service de l'américain, et des revers qui n'avaient pas tout à fait leurs vitesses et leurs précisions habituelles. Une finale de 90 minutes et un score presque aussi sévère que celui de Wimbledon - dans l'autre sens ! - 6-4 6-2 6-2. Beau joueur, le suédois ne parla jamais de cette blessure à la conférence de presse, et félicita chaudement son vainqueur pour la qualité de son tennis. Une chose est certaine cependant : Borg reçut une piqûre antidouleur avant la finale. Le suédois qui n'avait jamais semblé gêné pendant les tours précédents, était probablement légèrement diminué pendant la finale. Il faut donc reconnaître que même dans cet état, il fallait un Connors et personne d'autre pour battre Borg cette année là !

Borg soigne son ampoule au pouce.
Aïe, aïe, aïe...
.
Les rêves de chelem s'envolent pour le suédois. Et pour les années à venir, rien n'avait l'air de pouvoir arrêter cette série de finales entre les deux grands champions de l'année 1978. Et pourtant ! Un rival de grande classe allait rapidement changer la donne et faire parler de lui. John McEnroe, 19 ans, va vite s'affirmer comme un possible N°1 mondial en cette fin d'année 1978. En septembre, il gagne coup sur coup deux tournois à Hartford et à San Francisco. En novembre, remporte les tournois de Stockholm - où il bat Borg en demi-finale ! - et de Wembley. C'est la première fois que Borg est battu par un joueur plus jeune que lui. Enfin, McEnroe finit l'année en beauté en remportant à lui tout seul la coupe Davis contre la Grande-Bretagne. Cette fois, plus de doute. En 1979, il faudra compter avec lui. Borg et Connors vont devoir se méfier...
.
Episode précédent : 1977 suite et fin


Episode suivant :  1979 : Connors à Roland-Garros

Des idées, des remarques, des suggestions?E-mail
 

Dernière mise à jour : 10 avril 2010
Copyright BLANCHE NET communications.
Avril 2010. .